Nos sociétés sont saisies par la compassion. Un « zèle compatissant » à l’égard des démunis, des déshérités, des exclus ne cesse de se manifester dans le champ politique. À tel point que les dirigeants n’hésitent plus à faire de leur aptitude à compatir un argument décisif en faveur de leur droit à gouverner. Phénomène circonstanciel ou nouvelle figure du sentiment démocratique ? Myriam Revault d’Allonnes interroge sans détour les rapports entre la dimension affective du vivre-ensemble, la nature du lien social et l’exercice du pouvoir. Remontant aux sources de la modernité, elle montre que le rôle des passions et des émotions n’a cessé de nourrir la réflexion sur l’existence démocratique, de Rousseau à Arendt en passant par Tocqueville.
Où l’on verra que, si le déferlement compassionnel ne fait pas une politique, les liens entre sentiment d’humanité, reconnaissance d’autrui et capacité d’agir nécessitent pourtant d’être pensés à nouveaux frais.
Myriam Revault d’Allonnes est philosophe, professeur des universités à l’École pratique des hautes études. On lui doit de nombreux essais de philosophie politique, dont Ce que l’homme fait à l’homme (Seuil, 1995) et Le Pouvoir des commencements (Seuil, 2006).
« Notre société est caractérisée par un « zèle compatissant », qui constitue un emblème de la place des sentiments en politique. La thèse de cet essai est que ce déferlement de la dimension des affects,... » Lire plus