L’image d’un puits que rien n’épuise symbolise à mes yeux l’étrange état qui semble relier trois démarches pourtant a priori différentes.
La première est celle du poème, du moins tel que je le conçois : à savoir, le produit d’un langage particulier, distinct de tout autre type d’expression et de communication, et donc aucune analyse ne saisit ni ne tarit jamais entièrement le sens.
La deuxième est celle de la condition humaine : à savoir, la réponse toujours incertaine et variable à la question concernant notre origine, notre être et notre destin.
La troisième est celle de la foi religieuse, du moins telle que je la vis : à savoir, l’expérience intime d’un Mystère, d’ordinaire appelé « Dieu », dont rien ne paraît capable de comprendre ni d’expliquer d’une façon satisfaisante l’énigme à la fois transcendante et immanente qui donne de Le connaître simultanément comme Absence et Présence, Personne et Quelqu’un, Non-Être et Être, Vide et Plénitude, Silence et Parole – tout en laissant subsister en nous la conscience qu’Il dépasse ces catégories et demeure, en tant qu’Absolu, sans nom ni face ni lieu.
Peut-être est-ce cette situation qui permet à la poésie, à la philosophie et à la spiritualité, à quelque nature qu’elles ressortissent, d’interférer sinon même, parfois et à l’ultime limite de leur propre processus, de s’identifier ?
J.-C. R.