On a l'habitude d'appliquer l'éthique au clonage, c'est-à-dire de demander à telle ou telle éthique d'exposer ce qu'elle pense du clonage et autres biotechnologies. Ici, c'est l'inverse qui est entrepris : on applique le clonage à l'éthique, on examine comment l'émergence d'un problème comme celui du clonage transforme la réflexion éthique elle-même. Les biotechnologies modifient certes l'homme, mais aussi l'éthique à partir de laquelle il les pense.
Comment réfléchir sur l'homme et son avenir, si l'on renonce à tout concept dogmatique de nature humaine ? Et si l'homme est ce qu'il se fait, pourquoi ne pas le laisser se faire jusqu'au bout, jusqu'à devenir le constructeur biologique de lui-même ? Pour répondre à ces questions, ce livre propose un renversement radical de perspective en matière de réflexion morale. Contrairement à la démarche commune aux nombreux comités d'éthique, il part de la conviction que les réponses éthiques ne préexistent pas aux questions qui les suscitent. Les propriétés morales qui articulent notre univers normatif sont des propriétés émergentes du monde humain. Elles naissent des problèmes mêmes qu'elles doivent normer. Dans le cas du clonage et des autres biotechnologies de pointe, ce sont les notions mêmes d'autonomie du sujet humain et d'altérité qui sont appelées à être renouvelées en profondeur.