« Refusez la priorité à cet automobiliste et coupez-lui la route : dans le meilleur des cas, il va frapper de l’index sa tempe, ou son front, sanctionnant à sa manière votre conduite irréfléchie. Ce geste simple est universel et probablement millénaire. Temporal et frontal protègent l’irremplaçable organe où résident ici mémoire, et là volonté, jugement, raison, esprit de décision. En être dépourvu par constitution, c’est être un animal inférieur. Pour un humain, en être privé par la maladie, c’est glisser vers la démence.
C’est là affaire de neurones. Ce neurone qui reçoit, compare, enregistre, répond, ordonne, tisse avec ses congénères des réseaux dont il maîtrise les nœuds et les centres, avant de décider un comportement et, bien plus tard, de créer les images mentales et la pensée. Et pourtant un neurone ne doit pas différer fondamentalement, si ce n’est par sa multiplicité, la richesse de ses arborisations et de leurs contacts, de la première cellule nerveuse apparue en ce monde. Celle-ci naquit peut-être du revêtement d’une éponge, plus sûrement d’un froncement de l’œuf d’une méduse. Avant elle, les autres cellules primitives communiquaient entre elles par des pores, assurant le troc paresseux de quelques molécules. »
Comment a-t-on pu en arriver là ? Histoire de cellules d’abord, mobilisant anatomie et psychologie, puis histoire de molécules ensuite, convoquant la neurochimie moderne, l’aventure du neurone nous mène jusqu’à la psychologie et la sociologie. Quoi de plus fascinant que de faire fonctionner nos neurones…sur leur propre histoire ?