Dans ce récit d’inspiration autobiographique, Abdelhak Serhane nous livre le portait émouvant d’une enfance marocaine dans les années 50 au sein d’une famille très pauvre installée dans un village isolée du Haut-Atlas. Enfance douloureuse marquée par une extrême misère matérielle et affective, et dominée par la figure d’un père violent et d’une mère soumise. C’est pourtant dans ce contexte que le jeune narrateur va faire son apprentissage de la vie, s’initier au français en lisant les bribes de journaux dont son père a tapissé le plafond de sa masure, et prendre peu à peu conscience de la condition peu enviable de ses compatriotes subissant l’arbitraire d’un pouvoir archaïque. Car à travers la profusion d’anecdotes souvent touchantes qui ponctue l’histoire de cette famille, c’est en filigrane un tableau au vitriol d’une société gangrénée par la corruption et les interdits religieux qui est ici brossé, à mille lieux de l’image parfois complaisante que l’on peut avoir en Occident de la monarchie alaouite. Un livre engagé servi par une plume alerte et une verve expressive.
Figure majeure de la littérature maghrébine d’expression française, Abdelhak Serhane est notamment l’auteur de Messaouda et du Deuil des chiens.