S’il y a un grand siècle de la peinture française, c’est bien le xıxe siècle qui inaugure avec la souveraineté de l’artiste l’autonomie de la peinture : « je suis mon propre gouvernement », dit Courbet, tandis que Cézanne forme le projet d’une apothéose de Delacroix qui ne vit finalement jamais le jour. Une ombre au tableau cependant, celle de l’empire colonial français naissant et de son prolongement pictural, l’Orientalisme, colonisation de l’Orient par la représentation occidentale qui fixe les traits de l’autre en son absence. À l’envers du tableau colonial, il y eut pourtant quelques peintres pour se laisser désorienter par leur rencontre de l’Orient et en recevoir une impulsion qui allait reconfigurer l’espace pictural hérité de la tradition européenne. Chacun à leur manière, Delacroix, Gauguin et Monet furent de ceux-là. À la politique de la domination, leurs œuvres opposent une politique de la peinture ouverte à la négociation avec des esthétiques hétérogènes.
Patrick Vauday est maître de conférences de philosophie à l’université Paris 9-Dauphine et directeur de programme au Collège international de philosophie. Ses travaux portent essentiellement sur l'esthétique et la politique des images. Il est notamment l’auteur de La Matière des images (L’Harmattan, 2001) et de La Peinture et l'Image (Pleins Feux, 2002).