Rabbi Nahman de Bratslav (1772-1810) est l’une des voix les plus marquantes du hassidisme, ce mouvement de révolte spirituelle né dans les principaux centres juifs d’Europe orientale, dont la doctrine allait bouleverser l’histoire du judaïsme et, plus largement, imposer de nouveaux enjeux à la pensée monothéiste. Par le biais de son fondateur, Israël Baal Shem Tov (1700-1760), le hassidisme inaugurait une appréhension du divin, une éthique de la relation et un quant-à-soi radicalement nouveaux. L’ensemble de ses postulats furent philosophiquement et littérairement reformulés par Rabbi Nahman. S’il ne renia pas d’un seul iota les enseignements originels du Baal Shem Tov (dont il était l’arrière-petit-fils), il en dévoila des facettes jusque-là insoupçonnées. Maniant le paradoxe jusqu’au vertige, Rabbi Nahman demeure le dernier des grands mystiques juifs et le plus redoutable ennemi du rationalisme en dépit de sa proximité avec le mouvement des Lumières. Violement anticlérical, il fut un ardent défenseur de la foi. Le plus souvent errant, il était habité d’une brûlante passion pour le pays de Sion. Si ses écrits sont surprenants au point d’avoir cristallisé d’emblée les anathèmes de tous ses contemporains, sa biographie reste étonnamment déconcertante. A moins que l’œuvre et la vie ne forment plus qu’un seul et unique défi à l’éternelle condition humaine.