Depuis 1633, date à laquelle Descartes range son Monde dans un tiroir, pour éviter d’avoir les mêmes ennuis que Galilée, il se trouve qu’aucun éditeur n’a jamais publié ce livre comme tel, et dans l’ordre où le souhaitait Descartes.
Cependant, il ne fait aucun doute que, pour Descartes lui-même, c’est bel et bien un traité à part et spécifique, même si celui-ci est resté inachevé. De fait, L’homme que l’ont traduit ou édite d’ordinaire comme un traité autonome, est le chapitre XVIII du Monde. Cette dissociation est d’autant plus dommageable qu’elle masque le projet même de Descartes, qui est d’articuler la révolution de Copernic à celle de Vésale, et de proposer ainsi une relation nouvelle de l’homme vis-à-vis du monde, où la médecine joue un rôle éminent. « La Leçon d’anatomie » de Rembrandt est emblématique à cet égard, puisque ce tableau célèbre a été peint en 1632, à Amsterdam, au moment et au lieu où Descartes médite précisément la partie du Monde consacrée à l’homme.
Cette édition intégrale du Monde est donc un événement doublement exceptionnel en ce qu’elle procure, non seulement, et pour la première fois, un texte complet, scrupuleusement établi (modernisé dans son orthographe et sa ponctuation), annoté et introduit par deux spécialistes, amis aussi un ensemble de documents iconographiques inédits, décisifs pour sa compréhension.