A l’automne-hiver 1914-1915, un chimiste allemand de grand renom, Fritz Haber, invente les gaz de combat. Il supervise la première attaque aux gaz, à Ypres, en avril 1915, point de départ de la terrible guerre des gaz qui marquera d’une tâche indélébile la Première Guerre mondiale.
En août 1944, Hitler ordonne le bombardement à outrance des cités anglaises et d’Europe continentale à l’aide des premiers missiles balistiques, les V-2. Ces bombes volantes, conçues par le jeune fuséologue allemand Wernher von Braun, font des milliers de victimes à Londres et à Anvers.
En novembre 1952, le test de la première bombe H américaine à Eniwetok révèle le potentiel destructeur terrifiant d’une arme mettant en jeu la fusion thermonucléaire. Son inventeur, Edward Teller, s’en félicite, déclarant : « Nous serions infidèles à la tradition de la civilisation occidentale […] si nous n’augmentions pas la maîtrise de l’homme sur la nature. »
Les travaux de Haber, de von Braun et de Teller ont donné à l’humanité, pour la première fois de son histoire, les moyens de sa propre destruction. Nous vivons sous le choc et la menace de cette révolution technique. Il est donc urgent, d’en comprendre les origines et les conséquences. Arthur Koestler disait qu’il avait fallu un siècle au monde pour assimiler la révolution copernicienne et qu’il lui en faudrait peut-être autant pour mesurer la portée de l’invention d’armes de destruction totale. Reste à savoir si nous disposons d’assez de temps pour accomplir cette indispensable mutation intellectuelle.