Mettre en évidence la tradition contre-subversive qui est au cœur de la politique américaine, la nommer et la décrire, tel est le propos de ce livre. Chacun de ses chapitres est consacré à un aspect, ou à une période, qui a sa place dans l’histoire de ce que Michael Rogin appelle ici la « démonologie politique ». Comme on le verra, l’auteur a parfaitement conscience que les expressions qu’il a dû forger, comme « tradition contre-subversive », ou « démonologie politique », n’appartiennent ni au langage ordinaire, ni au langage courant des historiens. S’il les introduit, néanmoins, c’est pour attirer l’attention sur cette caractéristique persistante de la politique américaine qui consiste à diaboliser ses ennemis réels ou imaginaires, que ce soit en les caricaturant, en les stigmatisant, ou encore en les déshumanisant.
Ces monstres, qui vont de l’Indien cannibale au noir violeur, en passant par la papale putain de Babylone ou les tentacules omniprésents du complot communiste, sont autant de figures de cauchemar qui hantent la vie politique américaine. Tout l’enjeu de ces « Essais d’histoire politique » est précisément de tenter de comprendre leur signification et les liens étroits qu’ils permettent d’établir entre discours politique et symboles personnels, histoire privée et histoire publique des États-Unis.