la France de la défaite réclame des boucs émissaires. Parmi les premiers frappés, les juifs étrangers et les français israélites sont exclus de la communauté nationale, spoliés, pourchassés. Bon nombre d’entre eux sont internés avant d’être déportés vers les camps d’extermination.
Pouvaient-ils se soustraire à la législation de Vichy et aux ordonnances allemandes ? Comment ont-ils survécu dans la zone occupée où l’antisémitisme ordinaire et violent, des centaines de mesures discriminatoires, y compris le port de l’étoile jaune, les rafles enfin, faisaient peser une menace constante ? La zone « libre » a-t-elle été un refuge ? Dans la zone d’occupation italienne et en Afrique du Nord, leur sort fut-il meilleur ? Les années 1943-1944 ont-elles été plus tragiques encore ? Quelles formes de résistance ont-ils adoptées ? De quel appui ont-ils bénéficié auprès de la population ? Ont-ils su s’unir face au péril ?
Autant de questions qu’il est légitime de poser aujourd’hui. Car, avec les passions et les controverses qu’elle suscite, avec les ombres et les mystères qu’elle ne dissipe pas, l’histoire prend forme, telle que les juifs eux-mêmes l’ont vécue, celle des obscurs, des sans grade, de ceux qui ne militaient pas, des enfants qu’on cachait, des maquisards du Tarn qui hissaient le drapeau bleu et blanc en même temps que le drapeau tricolore, de tous Juifs de France qui ont connu l’indicible détresse et affronté la tempête. Ce passé-là nous hante. C’était hier en France.
A. K.