«Au début, je pensais qu'ils m'avaient abandonnée. Pendant la guerre, la nourriture valait cher et la vie des hommes rien. C'était l'époque où le père d'une famille pauvre pouvait abandonner son enfant sur le bord de la route pour avoir une bouche de moins à nourrir [...]. C'est ensuite que je me suis dit que je m'étais perdue moi-même. Bien sûr, j'avais des parents et aussi une grande sœur [...]. Fatiguée de l'attendre toute la journée dans l'indifférence, j'ai commencé à faire un pas, puis deux pas pour voir ce qu'il y avait au prochain coin de rue. Après quelques pas, je me suis sentie désorientée, mais plus je voulais revenir sur mes pas, plus je m'éloignais encore.»
Dans les années quatre-vingt, dans le sud-ouest de la Corée, la jeune Insil, chassée de son village natal, Talgung, perdu au sein des monts Chiri, est inexorablement poussée vers une fin tragique... A travers quatre-vingt-six chapitres, comme autant de micro-nouvelles, l'auteur tour à tour lyrique, ironique, tendre et cruel dresse le tableau de la société coréenne contemporaine ; celui de la confrontation entre une logique bouddhiste implacable et une fulgurante réussite économique subsistuant à ses valeurs l'hypocrisie et les folies dévastatrices du règne de l'argent et du pouvoir.