L’ami de mon père. Mon père, journaliste au Petit Parisien, a été arrêté au mois d’août 1944 et condamné pour « intelligence avec l’ennemi ». Après jugement, il a été détenu à la maison centrale de Clairvaux d’où il a bénéficié le 11 novembre 1947 d’une libération conditionnelle. Tels sont les faits irréfutables.
Mais cet « ami de mon père », ce camarade de prison, cet homme dont j’appris qu’il s’était engagé à vingt ans dans la division Charlemagne pour combattre es russes sous l’uniforme allemand… et que je vis arriver un jour de l’été 1961, dans notre maison du Midi, au volant d’une Triumph décapotable, je me demande si je ne l’ai pas, pour une part, imaginé, afin de lui poser les questions qu’adolescent je n’avais posées à personne.
Jusqu’à ce que le temps adoucisse les blessures ou les impatiences de l’enfance. Ou que s’affirme le besoin d’écrire – cette façon de se détacher à jamais du passé.
Frédéric Vitoux