« À Kamaishi, la majorité des services municipaux n’a pas subi de dommages directs et fonctionne encore, ce sont les habitants eux-mêmes qui ont dû rechercher, transporter, examiner et conserver les dépouilles de leurs voisins, dont un millier étaient morts ou avaient disparu. Il me semblait par conséquent que c’était là, dans cet endroit singulier, qu’on pouvait le mieux rendre compte de la manière dont ces hommes et ces femmes continuaient à vivre avec, au cœur, le sentiment douloureux de voir leur terre couverte de coprs sans vie. Pour traiter d’un tel sujet, rien ne me paraissait plus parlant que la froide réalité des cadavres.
« C’est de cette réflexion qu’est née ma décision de noter au fil des jours le récit des scènes terribles qui se déroulaient dans les dépôts mortuaires pendant les deux mois et demi qui ont suivi le 11 mars. En choisissant de m’intéresser à celles et ceux qui s’étaient retrouvés là, je voulais retracer le processus qui les mènerait à s’approprier ces paysages dévastés, jonchés de cadavres, et témoigner aussi de la façon dont ils allaient se relever de cette épreuve et reprendre le cours de leur vie, malgré les blessures laissées par la catastrophe. »
Kôta ISHII
Ce témoignage extraordinaire, terriblement émouvant, traite de l'universel - l'homme face à la mort - et du particulier - l'approche japonaise de celle-ci.
Kôta ISHII, né à Tokyo en 1977, est journaliste et écrivain. Ses enquêtes, sur la pauvreté, la guerre ou la sexualité, interrogent et dérangent. Mille Cercueils est son quatrième livre.
Traduit du japonais par le groupe Honyakudan.