Le témoignage d’une survivante
Fatma vit dans un HLM, quelque part en France. Un mari, trois enfants, un chien, des petits boulots pour arrondir les fins de mois et un frère djihadiste, Boubaker el Hakim, considéré par les services antiterroristes comme le plus haut cadre français de Daech en Syrie jusqu’à ce qu’il soit exécuté par un tir de drone américain en 2016.
Boubaker était « l’émir français » de Daech, l’un des principaux responsables des attentats de l’État islamique, dont ceux du 13 novembre 2015. L’un des premiers à embrasser l’idéologie salafo-djihadiste au début des années 2000 à Paris, l’un des maillons essentiels de la célèbre « filière des Buttes-Chaumont » (Chérif Kouachi, l’un de ses membres, commettra la tuerie de Charlie-Hebdo en 2015).
Depuis son enfance, Fatma A. a vécu un enfer. Son frère a entraîné dans son sillage toute sa famille. Redouane, son deuxième frère est mort en combattant les Américains à Falloujah (Irak) en 2004. Ali, son troisième frère, est toujours détenu en Syrie où il risque la peine de mort. Sa sœur, Yasmina, a été condamnée à 4 ans de prison dont 18 mois fermes depuis son retour du « califat » avec sa fille. Sa mère, Habiba, est morte à Raqqa.
L’histoire de Fatma et de sa famille est emblématique de la mutation du phénomène djihadiste Français qui a emporté des fratries entières après le 11 septembre 2001.
Ce livre, au-delà de la photographie qu’il offre du milieu djihadiste, est le témoignage d’une rescapée à la personnalité hors du commun. Il est aussi un geste de libération magnifique.
Magali Serre réalise et écrit des documentaires. Dès 2005, elle croise le parcours de Boubaker el Hakim, Peter Cherif (« mari » de Fatma, récemment condamné à perpétuité) et Chérif Kouachi. Elle est aussi l’autrice de Les Wildenstein (Lattès, 2013)
Fatma A. est une survivante de cette famille où régnait et qui a fait régner la terreur.