Je plaiderai l’innocence. Réseau familial, hasard des études et de la vie : je n’ai jamais songé à devenir médecin. Ni regretté de ne pas l’être devenu, bien que ce soit là, manifestement, ce qu’on appelle un « beau métier ». J’ai été peu malade et bien soigné. On ne trouvera donc pas dans ce livre le fruit d’une vocation inassouvie ou l’exutoire d’une rancœur accumulée. Les chromos et le poujadisme me semblent également détestables. Je me suis intéressé aux médecins parce qu’ils sont intéressants : quiconque est curieux du social, des gens, trouvera en eux des interlocuteurs privilégiés. Ils sont une plaque sensible de l’existence commune. Ne déversons sur eux ce qui nous gêne, nous agresse, nous terrifie. Nous leur déléguons nos plaies et nos morts. Parlant d’eux-mêmes, ils parlent de nos secrets.
Mon livre est un voyage, pas un essai. N’étant point médecin, je n’ai aucune prétention à juger la médecine. J’ai, au contraire, tenté de préserver en moi la force candide. Je me suis posé une question simple : quel est le métier de l’homme ou de la femme qui me soigne ? Comment vit-il ce métier, comment, comment ce métier façonne-t-il sa vie ?
H. H.